Le conflit et moi
J'ai commencé par essayer d'être gentil. En fait, au fond, je me considère comme quelqu'un de gentil : toujours prêt à aider, serviable, aimable, avec la compassion qu'il faut pour comprendre les émotions des autres et la volonté qu'il faut pour passer à l'action sans trop se poser de questions. Cela m'a bien servi, je dois dire, dans certaines phases de ma vie : j'ai eu le sentiment d'éviter bien des conflits stériles en étant « diplomate », de me faire rapidement adopter par la famille de ma compagne, et du point de vue professionnel j'ai été embauché sur ces qualités pour devenir coordinateur dans une association. J'ai même réussi à être apprécié de mon boss et à adoucir ses ardeurs et accès de colère qui en faisaient trembler plus d'un ! Toujours prêt à m'adapter pour rendre les choses faciles, il semble que tout le monde vient à m'apprécier et que tout va pour le mieux... jusqu'à ce que j'explose.
L'explosion
En effet, tout va pour le mieux... surtout pour les autres. Mon côté « diplomate » veut surtout dire que j'évite les conflits en prenant un point de vue relatif au lieu de défendre le mien, quitte à regretter de ne pas avoir dit ceci ou cela, au point que cela me ronge intérieurement pendant des heures voire des jours. Me faire apprécier des gens, oui mais à quel prix ? A celui de ne pas oser dire quand je ne suis pas d'accord, quand quelque chose me choque, de dire oui quand en fait j'ai pas envie... au fond, au prix de ne plus être moi-même. Mais alors que vaut ma parole ? Le oui que je donne contre moi a-t-il la moindre valeur ? Les gens m'apprécient moi, tel que je suis, ou l'ombre fabriquée de ce que les gens veulent voir ? Certes, j'en fais beaucoup, avec passion, avec le sourire... pour les autres. Mais que vaut cette générosité fragile si elle s'accompagne du plus ou moins conscient ressentiment que « personne ne s'occupe de moi » ? Si elle s'étiole et finit par exploser en épuisement, dépression, voire burn out ? A qui vais-je être de la moindre utilité dans cet état ?
Le changement nécessaire
C'est pourquoi il m'a fallu changer. Pour ne rien regretter il m'a fallu apprendre à communiquer fermement mais avec souplesse pour dire ce que j'ai à dire. Pour donner un oui 100% positif il m'a fallu apprendre à dire non. Pour être 100% généreux sans rien attendre en retour il m'a fallu apprendre à l'être quand cela vient vraiment de moi, et non plus systématiquement. Pour éviter d'exploser il m'a fallu apprendre à prendre soin de moi. Aujourd'hui je ne dirais pas que je suis parfait, loin de là , mais chaque petite victoire est bonne à prendre : j'ai su dire non à mon boss et poser mes limites. Je peux dire que ma peur des conflits ne m'arrête plus et que j'entre en confrontation prêt et déterminé si besoin. Je sais ce qui me fait du bien et prendre soin de moi est ma priorité, offrir mon temps et mon énergie aux autres est ma joie.
L'équilibre nouveau
A présent je sais que c'est possible. Si on me l'avait dit plus tôt dans ma vie, je ne l'aurais pas vraiment cru. Mais oui, c'est possible d'être généreux, ouvert, gentil, tout en faisant de soi-même une priorité. C'est possible de prendre soin de soi sans être ni avoir l'air égoïste. C'est possible de dire non sans être rejeté, culpabilisé ou se sentir abandonné. En fait, c'est non seulement possible, mais absolument vital : il est vraiment temps de s'affirmer pour qui on est, d'être à l'écoute de soi et de ses besoins, d'arrêter d''éviter les conflits et de se dévaluer sans cesse. Sans quoi, c'est soit le burn out ou la crise de la quarantaine assurés, ou alors c'est une vie d'esclave où on est enchaîné à l'opinion des autres, à leurs désirs, ou à leurs besoins. Alors qu'au fond, il suffirait de dire non. Ça suffit. Moi aussi j'ai le droit d'être écouté et de prendre soin de moi. Facile à dire ? Pas si difficile à faire, si on s'en donne les moyens...
Soyons ensemble
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